Chacun sait que l’honorable établissement C.F. Martin & Co, le plus ancien des fabricants de guitare encore en activité, a eu une importance de taille dans la popularisation du ukulélé aux Etats-Unis au milieu des années 1910.
On rappellera l’excellence des artisans luthiers qui officiaient dans les ateliers de Nazareth et qui ont façonné des instruments d’exception qui sont parfois arrivés jusqu’à nous et attisent la convoitise de nombreux amateurs de part de monde.
Martin a accompagné dès lors l’histoire de l’instrument avec ses hauts et ses bas : de l’âge d’or entre 1927 et 1930 à la fin de la production en 1977 (No Future, message arrivé jusque Nazareth). Puis début des années 2000 Martin relance la production des ukulélés dans son usine mexicaine pour prendre en marche la “nouvelle vague” naissante du ukulélé. C’est la venue du SO uke, un instrument en acajou massif beigeasse plutôt controversé qui ne convainc pas les amateurs avertis de la marque et ne frôle pas même de loin le son réputé des instruments de l’ancienne production, et ce pour un prix jugé trop élevé.
Début 2006, alors que cette vague déferle sur l’univers musical et envahie la planète, Martin relance sur le marché des modèles “made in USA” avec la copie du modèle haut de gamme des années 20 : le 5K. En 2007 c’est au tour de la copie de l’historique modèle unique “Daisy” du musée Martin qui réapparaît sous forme d’une série limitée à 100 exemplaires : juste un 5 en acajou. Début 2008 c’est la fameuse série 3 qui renaît avec des essences de bois variées (cherry, acajou, koa). Il s’agit pour ce qui concerne les séries 5 et 3 d’instruments hauts de gamme, plutôt chers, qui ne sont pas venus en nombre jusqu’à nous en France, en particulier parce que l’importateur a choisi de ne pas offrir aux amateurs français autre chose que du SO. Pas de marché, pas assez de marge, pas d’amateurs suffisamment “fortunés” pouvant attirer l’attention sur ces modèles et “moderniser ” l’image de la marque ? Dommage.
Martin redore-t-il son blason de vétéran honorant la mémoire de son illustre grandeur au travers ses ukulélés ? Je n’ai pas la réponse car pas assez d’expériences ou de témoignages qui apportent des éléments de réponse. Tout juste un essai plutôt concluant d’un 5K neuf réalisé chez Charle en avril 2009 en compagnie de ukulele.fr.
Janvier 2010 : le OXK est dévoilé au Namm californien d’Anaheim.
Appartenant à la série X, série économique de la marque, avec un corps réalisée dans le fameux PHL (High-Pressure Laminate) dont un des fabricants principaux s’appelle Formica ! C’est dit : un uke en for-mi-ca. Enfin, on attendait que ça… Glup. Et ça vient se mêler à l’une des plus anciennes et en tout cas des plus longues histoire de ukulélé ! Quand un des premiers modèles a traversé l’Atlantique pour faire le beau à la Messe de Francfort, sitôt la cérémonie passée, il a pris le chemin plus coquin du Boudoir. Wilkommen Herr Martin. Wir sind !
Je suis surpris immédiatement, pris de court : mince, c’est joli. Oui, c’est un chouette son Martin ! Pas le grand souffle des vieux instruments, mais un son riche et moelleux, pas toc, sérieux, agréable à écouter, rond, flatteur. C’est très homogène sur les quatre cordes, très harmonieux et équilibré. Je le trouve un poil sourd, comme fermé… Le HPL voudra-t-il s’ « ouvrir » à l’usage ? Pas sûr, mais dites-moi si vous avez un avis sur la question. La projection est toutefois très honorable.
Les cordes d’origine sont les M600 de la marque qui fonctionnent bien avec une tension façon Worth Clear Medium. J’ai changé pour des Aquila pour voir et retrouver un touché connu mais sans conclusions particulières pour le moment. Il me faudra plus de temps pour avoir une opinion arrêtée et des arguments. Donc c’est drôlement en sa faveur, un réelle impression de qualité. Bonne nouvelle.
Réglage, fiabilité
L’action est impeccable. Les mécaniques luxueuses. La finition excellente.
La surface de la caisse est probablement très robuste au chocs ainsi qu’aux dépôts de ketchup, mayonnaise ou beurre de cacahuète. Hop, un coup d’éponge, re-hop un coup de torchon et voilà : très adapté pour un Elvis & Mac Do World Tour. Le manche n’est pas près de se déformer, c’est du costaud : stabilité et pérennité garanties. Rien à dire sur la justesse parfaite. Aucun réglage à prévoir.
Odeur de la rosace
Mélange de bois et de colle sucrée : plaisant !
Conclusion
Qui veut un uke en formica ?
Le OXK est un héritier. Celui d’une grande famille. C’est avec une légitime curiosité qu’on peut être attiré par cette jeune pousse. Le budget. Il est proposé à 279 $. Le SO est vendu 339 $ pour un uke à la finition nettement moins flatteuse pourtant tout en acajou massif mais à l’apparence de bois brut très sec, avec sillets en résine, 12 cases seulement et pas de repères de touche. Bizarre de trouver deux modèles à un prix presque identique. Ce OXK est une réussite, le SO ne l’a jamais démontré. L’un est-il là pour remplacer l’autre dans le bas de gamme des ukulélés Martin ? Pas impossible.
C’est un peu moins cher qu’un Flea avec touche palissandre (297 $), alors à choisir… Le OXK un véritable ukulélé avec un vrai son boisé ! Il est de très bonne facture. Solide, il supporte les changements de température et d’hygrométrie, vous l’avez compris. Il est aussi idéal aussi pour y mettre une cellule par exemple.
Alors voilà un uke pratique, pas trop cher (prix à préciser si importation perso ou achat chez revendeur européen soit entre 250 et 330 euros). Les matériaux peuvent rebuter, c’est vrai. C’est simplement du technologique proprement mis en bouteille, alors pourquoi pas. Pas un poil l’aspect d’un uke économique mal ficelé. Du beau travail. Il est livré par contre avec un moche padded big bag. On peut toutefois se poser une question… Pourquoi Martin ne sort-il pas un Style 0 en acajou vernis à l’ancienne, bien foutu, tout simple et violemment efficace, comme dans le temps et comme ils savent le faire pour les guitares à l’instar de la nouvelle guitare 00-15M, très honnête héritière des anciennes 00-17. Ce nouveau style 0 va sûrement apparaître au NAMM en janvier 2011, s’appellera le SO-M et vaudra 400 $. Ça sera classieux. On va se l’arracher. On peut rêver non ?
En attendant, réveil, le OXK sera disponible en principe vers septembre 2010 aux Etats-Unis. On commence à s’arracher les premiers modèles d’expo qui circulent. Comme quoi.
Fiche technique
Tête : koa composite
Mécaniques : fermées, finition nickel, blanc
Sillet de tête : Tusq blanc, 35,7 mm
Manche : bouleau multipli
Touche : palissandre, 17 frettes
Type de corps : ukulélé soprano
Diapason : 345 mm
Table : koa composite
Rosace : bandes multiples
Barrage de table : épicéa Sitka
Type de barrage de table : ukulélé soprano, non échancré
Dos : koa composite
Éclisses : koa composite
Chevalet : palissandre
Sillet de chevalet : Tusq blanc, flat
Cordes : Ukulele Clear Fluorocarbon Soprano/Concert (M600)
Housse